Plus de 6 ans après un Street Fighter IV (et ouais déjà) ayant redonné un coup de fouet au noble genre du jeu de combat en le rendant plus populaire que jamais, son petit frère Street Fighter V s’apprête à se dénuder publiquement à l’occasion d’une Bêta Online qui débutera cette nuit sur PlayStation 4. Ne pouvant pas y toucher faute de PlayStation 4, on a décidé de faire le point sur cet épisode plein de bonne volonté souhaitant attirer encore plus de joueurs que Street Fighter IV, pari impossible ? A voir.
HERE COMES A NEW STREET FIGHTER
La première chose à retenir avec Street Fighter V, c’est que c’est un jeu exclu console pour la PS4. Cette annonce a glacé le sang de plus d’un joueur et il m’est moi-même toujours impossible de me remettre de cette nouvelle, ayant choisi le mauvais « camp ». La surprise fut d’autant plus grande que Street Fighter IV et ses déclinaisons sont des jeux majoritairement joués sur Xbox 360, malgré les racines américaines de la console cette dernière possédait une version légèrement supérieure tant en terme de frame input (l’écart entre le moment où t’appuies sur le bouton et le moment où ton perso bouge) que de netcode (les lags en ligne et compagnie). Ainsi, on a vu une tripotée de joueurs aguerris passer de la PlayStation 3 à la Xbox 360 pour pouvoir jouer dans des conditions optimales, très vite cette version est donc devenue la version de référence et les tournois se faisaient uniquement sur ce support. Vous comprenez sûrement maintenant pourquoi l’exclu PlayStation a troué le cul a bien du monde. Vous remarquerez dans la première ligne de ce paragraphe qu’il est stipulé que le jeu est une exclue CONSOLE, car en effet ce dernier est aussi prévu sur PC. Gros avantage: Les deux versions seront cross-play, c’est à dire qu’il sera possible de jouer entre joueurs de la Master Race et joueurs PS4, finies donc les railleries de récré telles que « MAIS LA COMMU PS3 ELLE EST MOINS SKILLAY » ou « SI J’AURAIS UNE XBOX JTE NIQUERAIS TU VERRAS », ici tout le monde est logé sous le même toit.
Les plus mauvaises langues (comprenez les joueurs One) jouent sur les mots en admettant que Street Fighter V ne sortira pas sur la console de Microsoft, mais que rien n’empêche à Capcom de sortir Super Mega Street Fighter V Alpha Edition + (vous le sentez l’humour super original ?) sur One. SAUF QUE NON PÉLO ! Capcom a en effet évoqué très clairement durant l’EVO que le jeu serait la seule et unique version de l’univers SFV ! Et là vous vous dites: « Comment ça Capcom ne va pas résister aux sirènes du DLC et de la version Upgrade ? On parle bien de l’entreprise japonaise aux doigts crochus là ? », bougez pas, on vous explique.
Fight for the Future
Voici le modèle économique que Capcom cherche à mettre en place, ne mâchons pas nos mots, c’est littéralement de la bombe. Vous avez sûrement été un jour dans ce cas où, alors que vous jouiez assidûment à un jeu de combat, bossant vos combos et vos frames comme un bon théoricien de la savate virtuelle, vous avez du passer par la case DLC pour obtenir la mise à jour du dit jeu, comme ce fut par exemple le cas avec les quatre versions de Street Fighter IV. Ces mises à jour payantes sont en principes justifiées par des nouveaux personnages ajoutés au roster, et même si vous ne désirez pas jouer ces personnages, vous devez débourser au moins quinze euros pour avoir la mise à jour de VOTRE personnage. Autant dire que petit à petit, la communauté s’effiloche car certains ne sont pas assez acharnés pour claquer du fric pour au final pas grand chose.
De l’autre côté nous avons les jeux en Free-To-Play, à l’instar de Killer Instinct sur One, Soulcalibur Lost Swords sur PS3 ou encore DOA5: Core Fighters sur PS4 et One, qui proposent de jouer au jeu « gratuitement » en proposant ensuite tout le contenu du jeu à l’unité ou en packs. Sur le papier le modèle est génial, car rares sont les gens qui s’amusent à jouer tout le roster et celà permet de plus d’alimenter continuellement le jeu sans subir la grogne des joueurs, n’ayant rien payé ils ne risquent pas de gueuler, malgré cela ce modèle n’a pas percé. C’est sûrement une raison de clareté: j’ai pour habitude de ne jouer qu’un ou deux persos par jeu de VS Fighting et de ne quasiment jamais toucher aux autres; néanmoins pour une raison qui m’échappe, j’aime me dire qu’à n’importe quel moment je peux jouer avec un perso inhabituel pour faire le con sans avoir à me poser des questions telles que « Et si je prends un pack de 3 persos ça me reviendra pas moins cher ? » pour au final me rendre compte que d’acheter le jeu plein pot en boite était la meilleure solution. Ne parlons pas des dérives de ce modèle économique poussant les joueurs à irrémédiablement payer pour éviter de crever d’ennui en passant 153h à débloquer une connerie, comme ça nous est tous arrivé sur un bon vieux freemium de merde.
C’est là que Capcom entre en jeu ! Ono et sa bande ont décidé d’osciller entre la plaisance de la gratuité et le confort d’une offre Premium. Ainsi, la seule et unique version du jeu sera upgradée de façon gratuite pendant des années, les joueurs ayant ensuite le choix entre débloquer eux-mêmes ces nouveautés avec l’argent du jeu ou en proposant une monnaie dite « Premium » qui permettra de débloquer tout directement. Dit comme ça, on a l’impression de se retrouver face au modèle habituel des jeux King et compagnie, sauf que payer le jeu 70€ permettra NORMALEMENT d’éviter de tomber dans le n’importe quoi. Des défis hebdomadaires seront de plus sûrement proposés pour maintenir les joueurs en haleine et les motiver à revenir sur le jeu, ainsi les joueurs plus occasionnels qui n’en ont que foutre des frame data et des match-ups de leurs persos auront malgré tout toujours quelque chose à faire. De l’autre côté, les joueurs forcenés qui voudront juste appréhender les nouvelles mécaniques de gameplay apportées par les mises à jour pourront le faire sans débourser un centime. Tout ça est magnifique, on est face au système parfait, reste à voir si Capcom saura faire bon usage d’une mécanique si bien huilée. Sur ce assez parlé d’argent, car si Street Fighter brille par sa capacité à aspirer le fric des joueurs, il brille tout autant par un gameplay profond et varié qui a toujours su plaire.
D’un point de vue roster, pour le moment le jeu compte huit personnages connus, chiffre qui arrivera à seize protagonistes au lancement du jeu. Et c’est là que je sors mon sac de pierres: on se rappelle tous de Street Fighter III, ce jeu boudé par le grand public pour une raison tristement simple, le jeu ne comptait pas assez de personnages du célèbre Street Fighter II, soit ! Reste que passé ce blocage sommaire, on se retrouve face au Street Fighter avec la meilleure direction artistique, la prise de risque en valait la chandelle. Sauf que depuis Capcom ne veut plus se priver des saintes bourses du grand public, sur Street Fighter IV déjà, le jeu ne comptait que quatre nouveaux persos à sa sortie (je compte pas Seth, c’est comme compter Dural ou Mokujin) dont aucun du troisième opus. Ici la proportion est moindre, mais le jeu ne comptera que quatre nouveaux persos sur seize, et pour le moment toujours aucun perso du troisième opus à l’horizon. Le seul petit nouveau connu à l’heure actuelle est Necalli, un sauvage avec de grosses tresses bien vénère rappelant un peu Evil Ryu dans certains de ses coups.
Au niveau design, les persos se tapent un style beaucoup moins grossier que dans Street Fighter IV qui ne brillait vraiment pas de par son chara design, tout particulièrement pour les persos originaux de SF2 qui étaient juste dégueulasses. Qui plus est, la plupart ont subi de grosses métamorphoses justifiés par le scénario du jeu (rires enregistrés), ainsi M.Bison a pris un petit coup de vieux et parait encore plus sadique, Charlie a des agraffes sur tout le corps car il a été ramené à la vie (ooooooh !), Birdie a un gros bide de bâtard à cause d’une cure de Redbull et Ken a une plantation bananière sur le crane , pour éviter d’être lourd j’éviterai de détailler davantage le design de ce dernier, c’est dans ces moments là que les mods de la version PC et les skins en DLC se font (déjà) attendre.
D’un point de vue gameplay, Capcom a décidé de rendre le jeu plus accessible qu’auparavant en agrandissant par exemple les fenêtres d’inputs. En gros les combos qui se jouaient à la frame sur le quatrième épisode passeront maintenant comme dans du beurre. On est ici sur une base de « Easy to Play, Difficult to Master » comme Capcom le dit si bien, en gros tout le monde ou presque peut s’y amuser, mais le jeu a une profondeur de gameplay permettant différentes lectures. Sauf qu’il ne faut pas prendre tout ce que l’on nous dit pour argent comptant: à l’instar du système économique qui semble trop parfait, il est quasi-impossible que Capcom ne fasse pas beaucoup de frustrés. Pour rappel, Street Fighter IV était à sa sortie considéré comme un jeu « casualisé » comparé à son aîné et nombreux sont les joueurs qui ont pesté leur mère en menaçant de repartir sur Third Strike parce que trop frustrés par ces enculés de joueurs qui bourraient des Ultra qui enlevaient 70% de barre avec Zangief pendant que eux se faisaient chier à faire des 12-hit combo qui enlèvaient que dalle (vous la sentez la frustration ?). Alors même si ces rebelles ont finalement continué à jouer à SFIV par pur sado-masochisme, il est objectivement clair que les exécutions étaient beaucoup plus pépères que sur les opus précédents, voir trop pépères (exemple au pif: les Target Combo qui n’ont pas de timing précis, il suffit d’appuyer sur les boutons dans l’ordre). Alors POURQUOI vouloir ENCORE simplifier l’exécution ? C’est pas un Marvel vs Capcom qu’on veut Ono ! Selon Capcom, l’éxécution simplifiée permet de donner plus de place au mind-game; cette justification fait un peu grincer des dents, car l’exécution, aussi compliquée puisse-t-elle être, devient à force d’entraînement de plus en plus automatique et n’est donc plus un frein au mind-game.
Sous le signe du V
Pour pondérer un peu ce propos quelque peu tranché, mettons en lumière la pierre angulaire du gameplay de cet opus: la jauge V
Grosso merdo, la jauge V de SFV est une jauge qui monte soit lorsqu’on effectue un certain coup (appelé V-Skill) soit lorsque l’on encaisse des dégats. A l’instar de la jauge de Super toujours présente, cette jauge est divisée en plusieurs « tablettes », à noter que tous les persos n’ont pas le même nombre de tablettes. Une fois qu’une tablette est remplie, le perso peut la consommer en effectuant un V-Reversal, équivalent du Alpha Counter de SFA qui permet d’effectuer un coup directement après un blocage. Enfin, une fois la jauge V totalement pleine, le joueur peut utiliser le V-Trigger. Pour ceux qui s’en rappellent, Street Fighter Alpha 3 avait un système appelé le V-ISM, système plus ou moins réutilisé sur Yun dans Street Fighter III et IV avec son Genei Jin. On retrouve aussi un mode similaire dans Killer Instinct 3, dans les trois cas ces techniques permettent d’enchainer des combos normalement infaisables pendant une durée déterminée. C’est plus ou moins pareil ici, sauf que le V-Trigger ajoute quelques autres subtilités de gameplay qui diffèrent selon le perso, Ken par exemple se met automatiquement à courir lorsque le mode est activé, Ryu fait plus mal et peut charger ses Hadoken qui stunnent alors beaucoup plus (à l’instar du Denjin Hadoken du troisième épisode), etc. Il est clair que le système n’est pas simple à comprendre et je me marre tout seul en imaginant les joueurs confirmés devoir expliquer ces mécanismes aux néophytes; mais une fois assimilés, la lecture du match est totalement différente et nettement plus grisante.
Là où l’Ultra de Street Fighter IV était gratuit, plaçable derrière une simple Focus et arrachait énormément de vie, le V-Trigger nécessite d’être inventif en changeant radicalement sa façon de jouer pour infliger de gros dégâts, car il est évident qu’une fois ce mode activé, l’adversaire va directement se mettre sur la défensive. C’est donc une possibilité de renverser le match, certes, mais qui se mérite. Au final, on tombe donc sur un bon compromis, un des gros points faibles de Street IV pour beaucoup disparaît et laisse place à un système beaucoup plus juste.
Sur le papier Street Fighter V est donc le compromis ultime étant capable de satisfaire tous les types de joueurs, du nostalgique occasionnel au forcené compétiteur, reste à attendre les retours des joueurs après cette Bêta pour voir si les failles qui seront très probablement trouvées seront plus ou moins frustrantes pour l’expérience de jeu. C’est d’ailleurs dans quelques heures maintenant que beaucoup d’entre vous allez pouvoir vider des jauges de V-Trigger dans la gueule des méchants piffeurs de Shoryu sur la Bêta du jeu. Pour ma part, je vais baver sur des Twitch comme un crevard et commencer à économiser pour me payer une bécane de luxe. J’ai le seum.